Urbanisme #438 : L'art et la manièrePériodiquesAnnée : 2024Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : En avant, l’art
Il existe un lien puissant entre l’art, les villes et les territoires. De très nombreuses études universitaires l’ont étudié au prisme historique, politique, sociologique ou économique, pour établir que les artistes, mieux que quiconque, savent capter les forces du réel ou les prémonitions du devenir des paysages urbains ou naturels afin de les « mettre en œuvre », et ainsi captiver et renseigner les observateurs.
Il faut dire qu’ils sont – investis à ressentir et suggérer une émotion véritable – libérés de toute exigence d’objectivité et de réalisme, quand les urbanistes, architectes et paysagistes s’appliquent à produire des diagnostics irréfutables sur lesquels ils développent des projets rationnels et mesurés (entendre : sobres, inclusifs, etc.). Rarement – jamais ? – les concepteurs de l’urbain ne convoquent la beauté en tant que telle à leurs projets, bien que cette dernière contienne intrinsèquement une forme d’évidence et de justice.
Partant de ce constat, nous pourrions souscrire à l’idée que l’art est une forme de connaissance et compréhension des villes et leurs réalités sensibles, autant qu’un moyen d’imaginer et concevoir leur devenir. Et, parfois même, les deux en même temps.
Quand Piero della Francesca a peint le décor urbain en sublimant l’art de la perspective établi par Brunelleschi, a‑t-il représenté ou inventé la ville de la Renaissance ? L’Angélus, de Millet, n’est-il pas un témoignage extraordinaire des réalités des campagnes françaises au mitan du XIXe siècle ? Les espaces urbains métaphysiques de Giorgio De Chirico ne constituent-ils pas des représentations quasi prémonitoires de la ville moderniste ?
La liste des références d’œuvres peut être étendue indéfiniment et élargie aux arts autres que plastiques : Metropolis, de Fritz Lang, et la somme d’images hyper-structurantes de la ville futuriste qui ont alimenté – et continuent d’alimenter – les représentations de l’environnement urbain et la création architecturale ; Cité de verre, de Paul Auster, portrait macabre (l’aliénation des hommes, la fin des avant-gardes…) de la ville postmoderne, avant même (le roman a paru en 1985) son avènement digital ; ou bien encore, les mondes urbains virtuels des clips de Gorillaz ou Daft Punk…
Face à ces œuvres, ce que nous projetons dans les villes et les territoires, réels ou fictionnels, c’est notre humanité, et avec elle, nos émotions ne sont jamais loin de nos valeurs et de toutes nos préoccupations, sociales, écologiques ou autres. Sans doute les artistes parviennent-ils à saisir ce qui se cache dans l’épaisseur des villes, qui en constitue l’identité et la force, et qui semble parfois manquer dans les travaux des urbanistes.
Mais pas question d’opposer les uns aux autres, plutôt d’appeler de nos vœux à de plus fréquentes et intenses collaborations, qui permettent d’instiller un esprit et une audace d’avant-garde auprès de tous les donneurs d’ordres. Et de disposer de plus nombreuses représentations affectives des défis auxquels nous sommes confrontés, mais aussi, et surtout, d’un avenir post-carbone hautement désirable. La revue Urbanisme HS #79 : No cultures, no futuresPériodiquesAnnée : 2024Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Du 15 au 17 novembre 2023, la 44e Rencontre nationale des agences d’urbanisme s’est tenue à Clermont-Ferrand, sous la houlette de l’agence d’urbanisme Clermont Massif central (AUCM) et de la Fnau.
Lancés autour de la thématique « No cultures, no futures – pas de réorientation écologique sans recomposition culturelle des territoires », les débats ont permis d’évoquer, durant ces trois jours, la manière dont la culture peut – doit ! – servir de vecteur et de levier à la transition écologique en cours.
Mis à l’honneur, le territoire Clermontois a, quant à lui, pu dévoiler ses nombreux atouts lors des dix explorations menées aussi bien en centre-ville qu’autour de la métropole, que ce soit à Thiers, Lezoux, Vichy, Aubière, Châtel-Guyon, Saint-Beauzire ou Gerzat. Urbanisme HS #78 : La politique de la ville au défi de la transformation écologiquePériodiquesAnnée : 2023Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Les quartiers populaires, et notamment ceux qui relèvent de la politique de la ville, font l’objet d’une attention particulière et d’un investissement important de l’État, des collectivités et de l’ensemble de leurs partenaires – au premier rang desquels la Caisse des Dépôts et la Banque des Territoires – depuis près de quarante ans, augmentés depuis 2003 par la création de l’Anru. Aujourd’hui, une nouvelle ère de projets est mise en œuvre, ou sur le point de l’être, visant à intégrer ces quartiers dans le droit commun de la ville ordinaire pour y assigner les mêmes objectifs et en tirer les meilleurs résultats. Ces projets structurés autour du thème de « résilience » ont pour objectif de réparer ces quartiers, pour réparer la ville elle-même et améliorer les conditions de vie de leurs habitants en même temps que celles de la ville et du territoire. Le Moniteur #6247 : "Les maires ne contestent plus le ZAN"PériodiquesAnnée : 2023Auteur : Fabien RenouEditeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : On doit lui reconnaître un certain flair. L'automne dernier, le député Renaissance Alexandre Holroyd se lançait dans la rédaction d'un rapport sur le financement des écoles nationales supérieures d'architecture (Ensa). Il ignorait alors tout de la flambée de colère qui allait embraser les amphis quelques mois plus tard, allumée par le manque de moyens décents. Ses conclusions arrivent à point nommé. Elles sont sans appel.
S'il prend en compte les récents efforts de l'Etat, le parlementaire pointe les « faiblesses aiguës et persistantes » de ces écoles qui « concernent les conditions d'exercice de la tutelle, le nombre insuffisant de personnels administratifs employés dans ces établissements, l'imparfaite remise à niveau des locaux, le nombre - stable depuis vingt ans - d'étudiants accueillis ainsi que le niveau des ressources financières de ces écoles ». Et ce n'est pas la lettre envoyée par la ministre de la Culture, ni même les fonds qu'elle a réussi à débloquer, qui permettront à eux seuls de se hisser à la hauteur des enjeux.
Jamais le métier d'architecte n'a occupé une place aussi stratégique dans la chaîne de valeur de la construction
Car, il faut le rappeler, si le quotidien d'un architecte n'est pas une sinécure, la profession n'a rien d'une voie de garage, bien au contraire. Il serait rageant que, pour des raisons purement matérielles, l'enseignement public de ce métier reste bloqué à 20 000 étudiants par an, dès lors que les débouchés existent. Jamais ce métier n'a occupé une place aussi stratégique dans la chaîne de valeur de la construction. Quand le foncier se raréfie, quand les matériaux se renchérissent, quand les usages évoluent à toute vitesse, c'est avant tout grâce à l'intelligence de la conception que les projets répondent aux impératifs de pérennité et de durabilité.
Cette responsabilité interroge ce métier si ancien. Elle réclame aux plus jeunes des savoir-faire inédits : géosourcer les matériaux, calculer le poids carbone, travailler sur l'existant, échanger avec les usagers… Tout cela aurait barbé nombre de leurs aînés, dont la vocation était motivée par l'image du créateur de génie, auteur d'esquisses inspirées. Par chance, cela passionne les générations actuelles. C'est aussi ce qu'il faut percevoir dans le malaise des Ensa : au-delà d'une impérieuse remise à niveau d'un système brinquebalant, l'enseignement de l'architecture réclame un souffle nouveau. Le Moniteur #6238 : Les routes, un patrimoine à bichonnerPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Fabien RenouEditeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : On peine encore à percevoir toutes les implications de la priorité donnée à la reconstruction de la ville sur la ville. Les équilibres économiques se trouvent bousculés par le coût du foncier, des déconstructions ou des transformations. Des compétences techniques nouvelles - de la dépollution des sols au diagnostic du bâti existant - deviennent incontournables. Des évolutions réglementaires s'efforcent d'encourager ce qui, jusqu'ici, n'était que marginal : surélévation, changement de destination… Sans parler du travail même de conception et de construction, infiniment plus complexe à réaliser qu'au milieu des champs. Le partenariat entre le public et le privé trouve dans la reconstruction de la ville sur la ville un nouveau terrain de jeu Cette mutation profonde n'épargne pas l'aménagement urbain. Sur la ville du déjà-là, les intérêts se croisent, les prérogatives s'enchevêtrent. Pour faire converger les points de vue, l'Etat et les collectivités se prennent à œuvrer main dans la main avec des promoteurs, des foncières voire des industriels. Le partenariat entre le public et le privé trouve ici un nouveau terrain de jeu qui exige un montage complexe, une confiance réciproque et une claire répartition des rôles. C'est cette tendance de fond qu'entend ausculter notre nouvelle série dédiée à « l'aménagement partagé ». Cette semaine, nous nous rendons dans la métropole lilloise, à la découverte de Quai 22, une opération mixte portée par deux promoteurs et une SEM. Les mois prochains, nous nous intéresserons à la requalification de friches commerciales, à la revitalisation de centres-villes dégradés, à la création de campus mêlant recherche et entreprises… Autant de projets issus de territoires divers et toujours sur mesure, mais qui, tous, sont venus à bout d'un cheminement tortueux à la faveur d'un esprit résolument collectif. Que le lecteur ne s'y trompe pas. Il n'y aura, dans ces exemples, ni grande leçon ni formule magique. Chaque cas est le fruit de contingences locales et de rencontres plus ou moins fortuites. Non reproductibles, ils n'en restent pas moins évocateurs de cette indispensable manière de fabriquer la ville aujourd'hui. En cela, ces opérations deviennent source d'inspirations. L'aménagement partagé aussi, ça se partage. Urbanisme #430 : Prospective - Au défi des utopies et du réelPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Au retour d’une pause hiémale dont le principal bénéfice fut, sans aucun doute, la déconnexion numérique, sautant dans le grand bain médiatique (presse x chaînes d’information x réseaux sociaux), j’ai manqué périr tout à la fois noyé et démembré par le tsunami glauque des points de vue. Car il n’y a plus d’information désormais, il n’y a que des avis. Si le succès des réseaux sociaux tient depuis l’origine à la possibilité offerte à tout un chacun d’être un commentateur (contempteur) de tout sujet aussi sophistiqué ou trivial soit-il, si cela fait longtemps déjà que la télévision et la radio sont les empires des chroniqueurs, nous ne pouvons que constater qu’une presse quotidienne, en se réduisant elle-même au rôle de relais desdites opinions qu’elle capture, engraisse et libère dans ses pages, a renoncé à l’information. Tout du moins au sens que lui donnaient ses pères contemporains, parmi lesquels Hubert Beuve-Méry. Cela fait longtemps que la prudence nous enjoint de vérifier ce qui est avancé, et nous avons pris l’habitude de vérifier qui parle. Mais il est de plus en plus difficile de le savoir, dans la mesure où l’erreur d’analyse (intentionnelle ou non) de quelqu’un n’ayant d’autre motivation que d’affermir sa posture est désormais reprise en canon dans tous les canaux médiatiques. Exemples les plus connus : l’artificialisation des sols qui représenterait la surface d’un département français toutes les x années selon les sources et Paris qui serait la ville la plus dense du monde. Dans le déferlement des avis, les voix des sachants (académiques ou professionnels experts) sont couvertes par le bruit assourdissant des apprentis-sorciers, des grandes gueules et autres colporteurs en plein exercice de placement de produits, qu’il s’agisse d’eux-mêmes ou d’une offre « étagère » miracle. Mais il y a plus grave : la diffusion de la parole et des actes militants non pas pour ce qu’ils sont – le plus souvent fondés, sinon nécessaires –, mais pour « l’objectivité » des enjeux auxquels ils s’attachent et la « nécessité » des actions qu’ils conduisent. Jusqu’à l’étourdissement, au mirage d’une justice citoyenne qui n’est pas sans rappeler de bien mauvais souvenirs historiques. Ainsi, quand un grand quotidien national soutient tacitement les « dégonfleuses » de SUV au nom de la lutte climatique, on ne peut s’empêcher de se demander quel regard il porte à cet égard sur le développement massif du chauffage au bois par les ménages les plus fragiles. Et surtout de se dire : qu’est-ce qui vient après le dégonflage ? Du bruit, encore du bruit, toujours du bruit. Le grand espace digital, cette promesse de connaissance universelle et d’augmentation de l’humanité est une nouvelle tour de Babel, un endroit où règnent le bruit, la confusion et où les gens ne se comprennent pas. Dans les anciennes langues sémitiques, Bāb‑Ilum désigne « la porte des dieux », mais, dans la Bible, la racine BLBL signifie « bredouiller », « confondre » ; on la retrouve dans le verbe babiller qui veut dire « parler beaucoup », d’une manière enfantine. Pas bien grave donc ? Si, car les approximations et les fake facts composent un maelström de biais dans lequel nous – humains – piochons allègrement, sans précaution ; mais pas aussi bien que ChatGPT qui achèvera d’en faire, au gré des volumes de reprises qui fondent ses statistiques, des vérités. Dans l’Ancien Testament, la tour de Babel est abandonnée par les hommes éreintés : ne serait-ce pas la plus grande utopie contemporaine ? Urbanisme #428 : EnergiesPériodiquesAnnée : 2022Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Quand nous avons inscrit, en octobre 2021, la question des énergies à notre calendrier éditorial, croyez-le ou non, nous avons dû faire face à bien des étonnements et interrogations. Or, vous qui lisez ces lignes, un an plus tard, vous êtes en train de vous demander – j’en suis certain – si la revue Urbanisme n’est pas en train de surfer sur la haute vague d’une crise qui touche désormais tout le monde et semble s’ancrer résolument dans le temps long. Pourtant, cette problématique ultrasensible des énergies a déjà produit, sur la courte échelle temporelle de la bascule de l’holocène à l’anthropocène, des évènements dramatiques (de guerres en crises) que nous n’avons pas pu ne pas voir, des conséquences sur l’environnement et le cadre de vie (pollutions, maladies…) que nous n’avons pas pu ne pas sentir et ressentir, une incidence croissante (jusqu’à devenir excessive) sur nos budgets que nous n’avons pas pu ne pas toucher. Nous n’avons pas eu envie de voir, de sentir, de toucher les impacts de l’évolution de nos modes de vie sur la planète et sur nos vies elles-mêmes. Les promesses de la mondialisation en matière de confort et pouvoir d’achat, opportunément catalysées par une énergie bon marché, étaient bien trop belles pour être assombries par des cas de conscience, pour être entachées d’éthique. D’autant que les industriels de l’exploitation et de la production d’énergie, de leur côté, s’appliquaient à rendre les questions de fond – ressources, émissions, déchets ultimes, etc., – presque parfaitement invisibles au plus grand nombre. Permettant ainsi, jusqu’à une période encore très récente, à chacun de se bercer d’illusions et autres pensées magiques, et aux acteurs de l’urbanisme de faire de cette question le plus invraisemblable et regrettable impensé de leurs projets. Notez à ce stade que si réveil il y a, personne n’a manifestement retenu la leçon, tant les acteurs du digital et de la logistique appliquent aujourd’hui avec succès les mêmes recettes d’invisibilité pour déculpabiliser les masses. Alors, que s’est-il passé en un an ? Dans les discussions quotidiennes, certains évoquent la guerre en Europe, et quand on leur rappelle qu’elle a commencé en 2014 avec l’annexion de la Crimée, ils précisent : les conséquences économiques de la guerre, et tout particulièrement la rupture d’approvisionnement en gaz de l’Europe par la Russie. S’ensuit généralement un débat entre néo-experts – comprendre informés – alternant géopolitique de l’épicerie (la moutarde), complotisme soft (les mains occultes) et inquiétudes non feintes (y aura-t-il de l’essence à Noël ?). Plus sérieusement, ce qu’il s’est passé en un an, c’est qu’une grande partie de la population s’estimant jusqu’alors pas ou peu concernée a touché du doigt sa dépendance énergétique, comprenant par là même que les ressources sont limitées et sensibles. Mais surtout, en conséquence, cette population a commencé à payer le prix de ses existences dispendieuses ; et brutalement atteinte au porte-monnaie, elle se surprend aujourd’hui à prononcer plus que volontiers, avec espoir, les mots sobriété et transition. De telle sorte qu’un numéro d’Urbanisme consacré à l’énergie prend aujourd’hui forme d’évidence. La Gazette des communes #2657 : Zones à faibles émissions - Comment faire passer la pilulePériodiquesAnnée : 2023Auteur : Jean-Baptiste ForrayEditeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : Ce qu'il y a de bien quand on reçoit un rapport de la Cour des comptes, c'est qu'on ne risque pas d'être frappé de stupeur et de tremblement. La dernière livraison annuelle, consacrée à la décentralisation, ne faillit pas à la règle. La France dénombre trop de communes, jugent, en substance, les pensionnaires de la Rue Cambon. Contrairement à l' Allemagne, à l' Italie et à l' Espagne, elle n'a pas su mener à bien le chantier des fusions de municipalités. Même reconfigurées, les régions hexagonales font pâle figure au regard de leurs voisines et ne disposent toujours pas de la force de frappe des länder.
CERCLE DE LA RAISON.
Une charge contre l'exception française digne d'un discours du Premier ministre Edouard Balladur en 1994, à moins que ce ne soit d'un rapport de l'OCDE de 2011. Il ne manque qu'une référence à celui d' Olivier Guichard, « Vivre ensemble », et aux premiers contrats de plan de Michel Rocard pour que cette prose ressemble à une copie de Sciences-po.
En dehors d'une piste tout à fait nouvelle, à défaut d'être tout à fait convaincante, la fusion-absorption de communautés de communes par des conseils départementaux ruraux, l'institution présidée par Pierre Moscovici reste fidèle aux canons du cercle de la raison.
Consacré à la décentralisation, le rapport annuel de la Cour des comptes manie à ravir l'art du balancement circonspect.
EN MÊME TEMPS. A la manière d'un éditorial d' Alain Duhamel, son rapport manie à ravir l'art du balancement circonspect. Il faut une nouvelle étape de la décentralisation, mais davantage contrôler les dépenses des collectivités. Il est temps de clarifier les compétences des divers échelons pour que le citoyen s'y retrouve. Mais il convient également de donner aux collectivités la possibilité de prendre des prérogatives particulières au nom de la différenciation territoriale. Les esprits facétieux de l'amphithéâtre « Boutmy », à Sciences-po, appelaient cela jadis : « Thèse, antithèse, foutaise ». Pur produit des lieux, Emmanuel Macron préfère parler d'« en même temps » et de « pensée complexe ». Le rédacteur du rapport « Attali » de 2008 retrouvera ses petits dans les préconisations de la cour. Le cercle de la raison et le balancement circonspect résistent décidément à l'épreuve du temps. La preuve, Alain Duhamel est toujours à la télé. Médiations #32 : La maîtrise d'oeuvre des opérations de réhabilitation de bâtimentPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Christian RomonEditeur : MISSION INTERMINISTERIELLE POUR LA QUALITE DES CONSTRUCTIONS PUBLIQUES MISION INTERMINISTERIEL KALIT DE KONSTRUKSION PUBLIKDescription : Les opérations de réhabilitation se multiplient et bousculent les modèles esthétisants de la qualité architecturale établis, laissant l’altérité, la souplesse programmatique, le provisoire, voire le bricolage, envahir le processus de transformation des constructions existantes. Face à ce nouvel engouement, la commande devant se diversifier, la maîtrise d’œuvre devant monter en compétence, étendant les questionnements méthodologiques et techniques à la transformation des bâtiments construits ces dernières décennies, il était impératif d’actualiser notre fiche technique Médiations n°17 datée d'avril 2007. Ainsi, ont été introduits dans cette fiche : une actualisation des références réglementaires, des légers compléments quant à certains domaines techniques à aborder (en particulier les données historiques et l’appréhension du vivant), une clarification des contenus attendus lors des différentes consultations, l’évocation de certains éléments lacunaires (droit de propriété intellectuelle, procédure adaptée ou procédure avec négociation sur intention) et enfin, la mise en exergue de deux outils pouvant être particulièrement utiles aux opérations de réhabilitation : la mission Diagnostic, comme premier élément de mission de maîtrise d’œuvre afin de vérifier la faisabilité du projet et parfaire la connaissance du bâti existant, et la souplesse de l’accord-cadre face aux surprises que peuvent réserver des travaux sur un site déjà construit en prenant en compte le temps et les incertitudes liées aux aléas et à l’avancement des investigations. Diagonal #216 : Les espaces protégés font bouger les lignesPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Virginie BathelierEditeur : DIRECTION GENERALE DE L AMENAGEMENT DU LOGEMENT ET DE LA NATURE DIREKSION JENERAL AMENAJEMAN LOJEMAN NATURDescription : En ce début d’année, les aires protégées sont en majesté avec la volonté lors de la Cop 15 sur la biodiversité de leur réserver 30 % des terres et des mers de la planète d’ici à 2030. L’enjeu est aussi qualitatif, il faut mieux préserver et renforcer l’efficacité des outils existants. Ceux-ci sont nombreux et correspondent à des niveaux de protection variés. Outre les points chauds de biodiversité qui nécessitent une protection forte, des réponses graduées s’imposent selon les problématiques locales. Pour autant, face aux menaces qui pèsent sur leurs territoires, la liste des chantiers à mener dans différents domaines et pour réguler les usages est longue. Elle dépasse les seules aires protégées. Mais, aux avant-postes des espaces ruraux, les gestionnaires ont la capacité d’innover et d’emporter par l’exemple d’autres secteurs. Ils peuvent favoriser l’acceptation sociale des contraintes environnementales grâce à des solutions alternatives apportant aussi un mieux-être aux populations. Et poser les jalons, peut-être, d’un rapport profondément transformé aux vivants non-humains. Le moniteur #6231 : RER métropolitains ces projets qui se disputent les milliardsPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Fabien RenouEditeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : Le Moniteur » n'est pas « Mediapart ». Alors, c'est vrai, nous n'avons pas l'habitude de nous voir claquer la porte au nez. Mais, quand cela arrive, nous n'apprécions pas plus le geste que nos confrères rompus à l'investigation. Suite à notre récente enquête sur « les escrocs de la réno » (voir n°6229 du 20 janvier), beaucoup ont applaudi - on leur dit merci. Certains ont râlé - c'est leur droit. D'autres n'ont rien dit. Or, c'était leur devoir.
Prenez l'Anah. Sollicité depuis des semaines sur le sujet, l'organisme qui distribue MaPrimeRénov' a toujours repoussé nos sollicitations d'interview. La semaine dernière, la cérémonie de vœux, moment d'échanges traditionnel avec la presse, s'est même transformée au dernier moment en événement à distance. Crainte du Covid ? Economie de petits fours ? Difficile à croire : cette visio présentait surtout l'avantage de ne laisser aucune place aux questions. Peu subtile mais efficace, cette pratique permet d'esquiver à peu de frais les sujets brûlants.
Institution publique, l'Anah se trouve soumise à un devoir de transparence vis-à-vis des citoyens comme des professionnels
Et alors ? Chacun est libre de répondre ou non aux questions posées, la liberté d'expression a pour corollaire celle de se taire. Sauf que l'Anah est une institution publique, dépensant de l'argent public dans le cadre d'une mission de service public. Et qu'à ce titre, elle se trouve soumise à un devoir de transparence élémentaire vis-à-vis des citoyens comme des professionnels. Au-delà de ces questions de principe, il est une évidence : mettre la poussière sous le tapis ne s'est jamais révélé un choix judicieux. Demandez à « Mediapart ».
Pendant ce temps, notre enquête sur les abus liés aux aides à la rénovation se poursuit. Elle explore de nouvelles zones d'ombre et sollicite d'autres acteurs. Là encore, on nous oppose un silence poli. Parfois, la fin de non-recevoir est moins amène. Il arrive même qu'elle s'accompagne de menaces de poursuites judiciaires. Provenant, en l'occurrence, d'un acteur chargé de défendre la probité de la profession, cette réaction surprend. Elle est surtout à contre-courant. Alors que le bâtiment a besoin de lever le voile sur des pratiques frauduleuses, revendiquer l'opacité n'est plus une option. Le Moniteur #6232 : Un chez soi conçu pour bien vieillirPériodiquesAnnée : 2023Auteur : Fabien RenouEditeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : Cela fait des décennies qu'on les voit venir. Inexorablement, ils avancent. Pourtant, l'arrivée des baby-boomers à l'âge de la retraite paraît nous prendre de court. Non contents d'être plus nombreux que leurs aînés et que leurs enfants, ils bénéficient à plein de l'allongement de l'espérance de vie. Lentement mais sûrement, ils déforment une pyramide des âges qui, d'ailleurs, n'a plus de pyramide que le nom.
En raison de l'alourdissement des dépenses engendrées par les pensions, c'est avant tout aux gouvernants que cette tendance démographique donne des cheveux blancs. Reste qu'elle pose aussi un défi aux acteurs de la fabrique du logement et de la ville. Il y a, bien sûr, un besoin impérieux de multiplier les structures pour les personnes dépendantes. Il y a aussi, à Vierzon, à Amiens et ailleurs, une demande croissante de certains des seniors pour des résidences dédiées. Reste la partie immergée de l'iceberg : le parc « classique » de logements, privés ou sociaux, qui hébergent pour longtemps encore l'essentiel des personnes âgées.
Le vieillissement de la population pose un défi aux acteurs de la fabrique du logement et de la ville
Architectes, bailleurs et collectivités en pointe sur ce sujet expérimentent au fil des projets. Ils tâtonnent et explorent différentes pistes. Faut-il imaginer un habitat qui répond aux besoins spécifiques de cette population ou bien privilégier des typologies capables de s'adapter à tous les âges ? Vaut-il mieux adapter le logement de toute une vie ou bien concevoir des habitats mieux situés et mieux dimensionnés ?
Cette recherche de solutions est intense et foisonnante, mais elle ne durera qu'un temps. L'adaptation du parc résidentiel au vieillissement est appelée à devenir un marché porteur en même temps qu'une politique publique autonome, avec son corpus réglementaire, ses règles techniques, ses circuits de financement… Or, on connaît les difficultés pour agir sur un parc existant morcelé et disparate. Petit à petit, le décollage de la rénovation énergétique ouvre la voie. Sobriété et séniorité, deux combats à mener de front. Urbanisme #429 : Le territoire la ville et le genrePériodiquesAnnée : 2023Auteur : Julien MeyrignacEditeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : La question du genre – des genres – est partout. Sur les écrans dans les questions d’actualité et les débats de société, sur les murs de nos villes où fleurissent les messages des colleuses et colleurs, dans nos cadres professionnels, dans nos foyers. Et aussi, depuis de très nombreuses années, dans les publications et les colloques sur l’aménagement et l’urbanisme. Nous n’avons donc eu aucune peine à nous convaincre que mettre la thématique des genres à l’agenda de nos publications était plus qu’un bon choix éditorial : une vraie nécessité. Mais nous étions loin d’imaginer son extrême sensibilité, bien au-delà du pourtant large domaine des métiers de la ville et des territoires, dans la société en général. Lors de la préparation de ce numéro, toutes les coordonnées du territoire « genres » ont été soumises à caution en comité éditorial et conseil scientifique, au prisme parfois de l’embarras ou de maladresses. Les seules questions inaugurales – « de quoi parle-t-on ? » et « d’où parle-t-on ? » – ont tissé un camaïeu d’incompréhensions brodé de fils identitaires et générationnels. Je crois que les doutes et les hésitations que chacun de nous a pu ressentir à la construction de ce numéro, et qui nous accompagnent désormais, ne sont pas son moindre intérêt et bénéfice. En effet, ce qui a été pour certaines et certains un partage, a aussi été, pour d’autres, une forme d’éveil. Avant d’écrire ces lignes, je me suis demandé : « Qui parle ? » Comprendre : « Suis-je légitime ? » Si les interrogations relatives à la prise en compte des genres dans les politiques d’aménagement et les projets urbains ont une essence universelle – et ne sauraient en conséquence être limitées aux enjeux « féminins » –, cette essence peut- elle véritablement s’exprimer sans une forme de « discrimination positive » ? Dans quelle mesure ? Quand devient-elle contre-productive ? Le devient-elle seulement ? Bien évidemment, celles et ceux qui ont contribué à ce numéro développent des certitudes épistémologiques et/ou militantes, et nous sommes certains que leur lumière, plus douce que nous ne l’avions imaginé – marqueur de sa meilleure diffusion dans une opinion plus mature –, va éclairer vos réflexions et projets ; en tout cas, en le fabricant, nous nous sommes forgé un certain nombre de convictions. Tandis qu’à titre plus personnel, la lecture de Dysphoria mundi, de Paul B. Preciado, achevait de me persuader que nous sommes en train de vivre une transition sociétale (sociale et politique) majeure, un basculement systémique global, qui ne peut être limité au climat ou à l’économie, et qu’il appartient aux urbanistes d’accompagner dans son déploiement irréversible. Enfin, si nous n’avons jamais véritablement considéré prendre un risque éditorial, nous nous sommes parfois demandé ce qui pourrait venir nous fouetter le visage en « passant la tête au-dehors ». Mais ce faisant, nos cerveaux et nos cœurs se sont emplis d’un air nouveau, revivifiant, nécessaire.