Le Moniteur #6338 : Le Grand Paris Express s'offre un puits de lumière
Périodiques
Année : 2025
Auteur : Fabien Renou
Editeur : ED LE MONITEUR MONITER
Description : Ça coûte cher, ça ne sert à rien… La chasse aux « machins » est un refrain populaire, au café du commerce comme dans le débat public. Ces derniers jours, ce sont les agences de l'Etat qui se sont trouvées dans la ligne de mire de grands élus de droite. Au cor : Gérard Larcher a lancé la charge. Au bout du fusil : l'Ademe, mais aussi l'Office français de la biodiversité. Le doigt sur la gâchette : Valérie Pécresse propose purement et simplement de supprimer l'agence de la transition écologique. Pan ! L'assaut fut violent et la polémique soudaine. Pourtant, l'attaque ne vient pas de nulle part. Un think-tank libéral, l'Ifrap, imaginait dès l'automne un dépeçage de l'Ademe. Surtout, ce coup médiatique se veut une réponse au RN, qui entend supprimer pas moins de 80 agences et opérateurs s'il accède au pouvoir. Ajoutez à cela la forte coloration écologique des organismes ciblés et vous comprenez que la stratégie est donc purement politique. Et fort peu pragmatique. S'en prendre aux milliards de l'Ademe, c'est jeter le discrédit sur des outils cruciaux pour le BTP. Car s'en prendre aux milliards de l'Ademe, c'est jeter le discrédit sur des outils cruciaux pour le secteur de la construction, comme le fonds friches, le fonds chaleur, France 2030… Autant de deniers publics dont ont besoin les collectivités dans leurs investissements et les acteurs privés dans leur transformation. Cet argent pourrait bien sûr être directement distribué par l'Etat. Mais alors, où se trouveraient les économies ? Quant aux agents, qu'ils soient récupérés par les régions, selon les vœux de Valérie Pécresse, ou recasés dans les Dreal, selon le plan de l'Ifrap, il faudra toujours les payer… De son vivant, Claude Allègre voulait « dégraisser le mammouth ». Aujourd'hui, des personnalités influentes prétendent le faire en se lançant dans une chasse au dahu. Il est de la responsabilité des élus de veiller à la bonne utilisation des derniers publics. Aucun budget n'est sacré, aucune procédure n'est intouchable. Cependant, au moment où Mayotte panse ses plaies et où Los Angeles brûle, il est incontestable que les investissements au service de la transition écologique des territoires figurent parmi les dépenses les plus utiles. En sortant le bazooka contre l'Ademe, les chasseurs risquent de transformer une simple partie de chasse en bain de sang qui éclabousserait tout le BTP.

Le Moniteur #6337 : Réseaux d'eau potable - Prendre la fuite à bras-le-corps
Périodiques
Année : 2025
Auteur : Fabien Renou
Editeur : ED LE MONITEUR MONITER
Description : Michel Barnier aura fait long feu à Matignon. Mais il aura eu le temps d'allumer une mèche. L'éphémère Premier ministre a en effet annoncé la fin du transfert obligatoire, au 1er janvier prochain, de la compétence eau et assainissement des communes vers les intercommunalités. Cette concession à une partie des maires risque malheureusement d'avoir des conséquences négatives sur l'investissement dans les réseaux d'eau potable, leur renouvellement et, en bout de course, la résorption des fuites. Le constat, pourtant, semble clair comme de l'eau de roche. Les trois quarts des réseaux les moins efficaces relèvent de la gestion communale, quand bien même celle-ci est devenue minoritaire. Dans ces localités rurales, souvent montagneuses, les ressources financières demeurent limitées alors que la dispersion de l'habi-tat renchérit l'entretien des canalisations. Sans soutien, elles se trouvent donc en première ligne lorsque l'eau vient à manquer. La bataille contre les fuites d'eau n'a rien d'un Himalaya budgétaire. Or, si les réseaux fuyards ne sont pas une nouveauté, le changement climatique devrait faire de ce chantier une priorité. En raison de la multiplication des périodes de stress hydrique, l'eau potable devient une ressource précieuse que l'on ne doit plus se permettre de dilapider. C'était d'ailleurs l'une des priorités du plan eau, annoncé par Emmanuel Macron en mars 2023 sur les rives du lac de Serre-Ponçon, symbole de la sécheresse de l'été précédent. Las, début 2025, il demeure impossible de connaître l'état d'avancement de cet engagement. La bataille contre les fuites n'a pourtant rien d'un Himalaya budgétaire. Quelque 750 M€ seulement suffiraient à transformer le rendement moyen actuel de 80 % en niveau minimum partout en France, estime l'OCDE. Centré sur les situations les plus dramatiques, cet effort permettrait d'économiser à peu de frais une partie du quasi-milliard de m3 perdus chaque année. Il faudra aussi aller plus loin, en mobilisant des techniques avancées d'auscultation et de détection mais aussi en améliorant la durée de vie des réseaux neufs. Condition essentielle : des maîtres d'ouvrage armés de savoir-faire pointus, d'équipes compétentes et de moyens financiers. La petite bombe allumée par Michel Barnier n'a malheureusement rien du pétard mouillé.