Le Moniteur #6304 : En Gironde, un complexe sportif aux allures japonisantes


Auteur : Fabien Renou


Périodiques
Année : 2024
Editeur : ED LE MONITEUR MONITER
Description : C'était la dernière séance. L'UGC Normandie, cinéma emblématique des Champs-Elysées, a fermé ses portes le 13 juin. En cause : un loyer devenu prohibitif pour une salle obscure. Un désaccord entre bailleur et locataire comme il s'en produit chaque jour. Cependant, ce rideau qui sur l'écran est tombé est aussi le symptôme d'un processus latent et plus inquiétant : « la plus belle avenue du monde » n'est plus une destination pour les Parisiens. Un bon millier de kilomètres plus au sud, la Rambla débute, elle, sa mue : circulation, revêtements, luminaires, plantations… La municipalité de Barcelone entend ainsi redonner à ses administrés l'envie d'arpenter cet axe majeur jusqu'ici vérolé de kiosques à souvenirs « made in China », jalonné de terrasses proposant de mauvaises pizzas à des prix exorbitants et arpenté jour et nuit par des hordes de touristes pas toujours respectueux. Face au tourisme de masse, les réponses urbanistiques traînent souvent en longueur A première vue, les deux promenades n'ont rien en commun. L'enseigne la plus chic de la Rambla doit être un Mango. Et les autorités catalanes rêveraient de troquer quelques Britanniques avinés contre une poignée de ces riches Asiatiques qui font la queue devant les boutiques de luxe des Champs. Pourtant, ici et là, c'est bien le tourisme de masse qui s'accapare un morceau de ville emblématique au détriment des habitants. Si, à Paris, la municipalité n'a pas officiellement de plan de reconfiguration des Champs-Elysées, ce n'est pas le cas des commerçants du quartier. Ils ont dévoilé fin mai un projet clé en main élaboré avec l'architecte Philippe Chiambaretta. Un coup de pression aux pouvoirs publics, à n'en pas douter. Une opération de lobbying, c'est certain. Reste que le sujet d'une éventuelle reconfiguration doit être pris au sérieux. Et sans tarder. La massification du tourisme, en effet, se fait à un rythme vertigineux. En trente ans, le nombre de nuitées annuelles à Barcelone a presque décuplé. Or, les réponses urbanistiques traînent, elles, souvent en longueur. Une bonne décennie séparera, si tout se passe bien, la désignation de l'équipe de maîtrise d'œuvre urbaine et la fin des travaux de la Rambla. Restera alors le plus difficile : inciter, par une offre commerciale et culturelle renouvelée, les locaux à se réapproprier un espace public qu'ils avaient déserté.