Auteur : Julien Meyrignac
PériodiquesAnnée : 2023Editeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Des paysages en mouvement
Effondrement de la biodiversité et les conséquences du changement climatique nous obligent à changer de paradigme, à redéfinir nos manières d’habiter et d’aménager nos territoires et, en somme, à innover. Au siècle dernier, l’aménagement de nos villes et nos campagnes s’est fait sans forcément prendre en compte la consommation foncière : les terres agricoles étaient abordables, le modèle du pavillon de périphérie déployé sur de larges parcelles plébiscitées, et l’implantation de grands centres commerciaux aux périphéries des villes répondait à un besoin des habitants et de l’économie. L’étalement urbain a ainsi été vu, à tort, comme une solution durant plusieurs années, sans qu’il ne s’impose de limites. Ce modèle a vécu. L’actualité des derniers mois en témoigne : nous sommes engagés aujourd’hui dans une reconquête de nos espaces délaissés, de notre sol et de nos espaces naturels. La loi climat et résilience a imposé des limites à la consommation foncière. Elle vise un objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050, ainsi que la division par deux du rythme d’artificialisation nouvelle à dix ans. Cette loi s’intéresse pour la première fois à la question de l’atteinte à la fonctionnalité des sols et à l’importance du sol vivant. Elle est fondatrice car elle permet de comprendre que les ressources ne sont pas inépuisables. Cette reconquête passe également par la réappropriation des franges urbaines : espaces de contact entre la ville dense et son environnement immédiat, elles ont longtemps été dépréciées. Aménagées et valorisées, elles offrent alors de nouveaux espaces publics pour les citoyens et des structures paysagères renforcées, favorables à la biodiversité. C’est bien dans cette optique que le ministère a lancé la troisième édition de l’appel à projets fonds friches, doté de 100 millions d’euros. Les citoyens demandent par ailleurs, à juste titre, plus de nature en ville : c’est une priorité. Le gouvernement a ainsi mis en place récemment un fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires : ce nouveau fonds de 2 milliards d’euros, placé sous la responsabilité du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, permettra de soutenir les projets des collectivités territoriales en faveur de la transition écologique. Il visera notamment à soutenir la performance environnementale des collectivités, l’adaptation des territoires au changement climatique et l’amélioration du cadre de vie. Ces différents leviers tendent vers l’exigence d’une plus grande sobriété, qui trouve sa pleine expression dans le projet lauréat du Grand Prix national du paysage de valorisation et de restauration du cap Fréhel, porté par le paysagiste Alain Freytet et le Conservatoire du littoral. Ce projet m’a séduite. Il est venu réparer, en quelque sorte, un paysage abîmé par l’homme, sans mettre de côté l’accès au site par le plus grand nombre. Ce projet, et plus largement le Grand Prix national du paysage, démontre combien l’innovation paysagère anime le processus de transformation des territoires, et met en lumière le rôle fondamental du paysagiste concepteur pour des territoires en mouvement. Si la défense de la qualité du paysage n’a pas toujours été prioritaire, je crois aujourd’hui ce combat en passe d’être gagné. Les mentalités évoluent, et nous devons nous en réjouir. Ensemble, continuons à œuvrer pour préserver la qualité de nos paysages, à les faire vivre.