Auteur : Julien Lacaze
LivresAnnée : 2024Editeur : SITES MONUMENTS SIT MONUMANDescription : Politique
Du grec politikos « de la cité » (polis), relatif à la cité, au gouvernement de l’État.
Ce qui touche à l’organisation de la cité ne peut être étranger à une association de protection du patrimoine. Que conserver, que construire, où le faire, selon quelle règle d’urbanisme ? Notre activité est en cela pleinement politique.
Il est vrai que, de l’acception première du terme à son sens second, il n’y a qu’un pas. Ainsi, la tendance de la municipalité parisienne à transformer une ville réglée par Haussmann en un chaos architectural et ses espaces verts en des friches est doublement politique. Comme l’est l’arrachage systématique des grilles et des murs protégeant la nature dans cette ville. Il s’agit, en modifiant la forme urbaine, de traduire des conceptions politiques. Là où Haussmann organisait la ville en l’assainissant et en l’unifiant, Anne Hidalgo la désorganise, dans un esprit libertaire se conjuguant parfaitement avec les appétits des promoteurs. Ainsi, défendre la matérialité du patrimoine parisien a-t-il nécessairement des conséquences politiques, celles de contrarier ici et là l’épanouissement d’autres « visions ».
Mais, lorsque nous nous opposons à la destruction de l’îlot de la Samaritaine par le groupe LVMH, adoubé par une municipalité socialiste, de quel côté de l’échiquier penchons-nous ? Et quand nous nous opposons à la destruction du havre de paix du monastère de la Visitation, voulue par l’Archevêché, permise par la maire de Paris et soutenue par un maire d’arrondissement et une ministre LR, quelle tendance politique flattons-nous ? Quid des nombreux combats menés dans les Hauts-de-Seine, bastion de ce même parti, notamment pour la défense de la cité-jardin de la Butte Rouge (dont la ministre – est-ce un hasard – a permis la destruction contre un avis de sa Commission nationale de l’architecture et du patrimoine) ? Sommes-nous d’extrême droite lorsque nous nous opposons à la destruction du quartier gitan de Perpignan par une municipalité RN fort peu soucieuse d’un secteur pourtant sauvegardé ou quand nous nous opposons aux travaux faits sans autorisation au château de La Barben par le très droitier « Rocher Mistral » ? Quand nous attaquons les municipalités de Paris, de Foix ou de Bourges, est-ce parce qu’elles sont socialistes ? La maire de Paris - qui bloque notre association sur les réseaux sociaux - tente ainsi de nous intégrer au mouvement #SaccageParis qu’elle range à « l’extrême droite ». Inutile, en réalité, d’attribuer des accointances politiques à Sites & Monuments, qui accomplit en toute liberté son objet social.
Notre activité est évidemment conservatrice, au sens premier du terme, d’où peut-être un malentendu ? Association reconnue d’utilité publique, nous agissons pourtant à l’image des conservateurs de musée, garants de l’intégrité des œuvres qui leur sont confiées. Les écologistes ne sont-ils pas également "conservateurs" ?...