Auteur : Emmanuel Caille
revueAnnée : 2025Editeur : SARL PUBLICATIONS D ARCHITECTURE ET D URBANISME PUBLIKASION ARCHITEKTUR URBANISMDescription : Malgré leur précision et leur clarté, les mots sont parfois impuissants à incarner la force d’un fait. Ainsi en va-t-il du terme réchauffement lorsqu’il qualifie l’évolution du climat. Car, avouons-le, celui-ci évoque d’abord une sensation de bien-être ; ne dit-on pas « ça me réchauffe le cœur » ou « le réchauffement des relations diplomatiques » ? On sait pourtant que la « petite » augmentation de 4 °C des moyennes de température d’ici 2100 aura de terribles répercussions. Parler de dérèglement, d’échauffement, voire d’embrassement climatique ne permettrait-il pas de marquer plus intensément les esprits ?
Toujours est-il que, sans réaction décisive et immédiate à cette menace, nous ne saurons pas nous protéger de chaleurs excessives autrement qu’en consommant encore plus d’énergies fossiles, amplifiant d’autant le cycle infernal d’élévation des températures. Pendant les millénaires précédant l’ère du pétrole, l’architecture a été le moyen le plus efficace développé par les humains pour supporter fortes chaleurs et froids intenses. « 4 °C entre toi et moi », l’exposition de Sana Frini et Philippe Rahm qui s’ouvre ce printemps à Versailles pour la Bap!, la troisième biennale d’architecture et de paysage d’Île-de-France, présente très concrètement comment les rigueurs climatiques ont depuis toujours stimulé l’imagination humaine pour inventer des architectures poétiques et comment, inspirés par ce passé, des architectes contemporains réinterprètent ces procédés ancestraux, les transforment et les adaptent aux techniques et aux enjeux d’aujourd’hui.
Ce sont les moments les plus emblématiques de cette exposition, qui se tient à l’ENSA Versailles jusqu’au 13 juillet, et dont le thème du réchauffement climatique a inspiré tout le numéro, que vous trouverez dans notre dossier de mai.
Légende de l'illustration :
Dante et Béatrice contemplant le paradis, Gustave Doré. L’Empyrée (La Rose céleste), 1868. « La chaleur est extrême, la lumière absolue. Ce Paradis est un milieu quasi radioactif, tout en irradiations et en flambées d’intensité […] au Paradis dantesque, les bienheureux ne souffrent pas du tout des vagues de chaleur, aucun n’est accablé, perturbé, altéré par l’intensité des canicules. C’est que les âmes des bienheureux sont dépourvues de corps. » Marielle Macé