Auteur : Romain Mazon
PériodiquesAnnée : 2023Editeur : ED LE MONITEUR MONITERDescription : La crise des « gilets jaunes » en a été le marqueur récent le plus spectaculaire : bien que fondée sur un diagnostic globalement non contredit en France, la hausse de la taxe « carbone » a été rejetée par une partie du pays, entraînant un cycle de violences inédit.
Dans un autre registre, le projet d'autoroute A69 mobilise des opposants déterminés à le stopper malgré l'affirmation de sa conformité réglementaire. Le ministre des Transports, Clément Beaune, a beau expliquer que tous les recours judiciaires ont reçu une réponse, que toutes les procédures d'enquête préalable et de concertation ont été respectées, rien n'y fait : des milliers d'opposants récusent la légitimité démocratique de la décision.
TRANSPARENCE.
Même l'autorité de la loi ne pèse plus auprès des citoyens : les zones à faibles émissions, dispositif mis en œuvre dans de nombreuses métropoles européennes sans susciter de crise, ne passent pas en France, malgré déjà deux lois. Dans son récent rapport consacré à l'acceptabilité des ZFE (1), l'ancienne ministre de la Transition écologique Barbara Pompili recommande de « mener des consultations publiques et d'assurer la transparence du processus d'élaboration du projet ».
Les décideurs locaux ne peuvent se contenter de dénoncer l'incurie de l'Etat car leurs décisions sont tout autant contestées.
QUESTIONS POLITIQUES. Sauf que si la démocratie représentative est en crise, la démocratie participative l'est tout autant (2). Laissons aux sociologues le soin de nous éclairer sur les raisons pour lesquelles des citoyens n'acceptent plus les règles du jeu démocratique. Et aux historiens de documenter les renoncements ou trahisons qui, sur le plan national, ont nourri ce désamour. Mais notons que les décideurs publics locaux ne peuvent, cette fois, se contenter de dénoncer l'incurie de l'Etat, car leurs décisions sont tout autant contestées. Pour les universitaires Alice Mazeaud et Guillaume Gourgues (lire p. 22-23), le hiatus tient en partie à « l'inflation des dispositifs participatifs », qui les dévalorise. Et les chercheurs de proposer de cibler la participation « sur les sujets qui soulèvent des questions fondamentalement politiques. Or, c'est exactement là où le politique ne veut pas qu'il y ait de participation ». On tient sans doute ici un début de réponse pour résoudre la crise démocratique.