Auteur : Henri Bava
revueAnnée : 2025Editeur : LES EDITIONS DE BIONNAY LE EDISION BIONAIDescription : L’art de la mesure, de la lenteur et du respect des milieux
Il me semble important de revenir sur le Congrès mondial de l’IFLA 2025 à Nantes ; il a constitué un moment fondateur pour la profession des architectes paysagistes et pour la reconnaissance de leur rôle essentiel dans la transition écologique et culturelle. Rassemblant des architectes paysagistes, chercheurs, étudiants et acteurs publics venus de plus de quatre-vingts pays, il a replacé la France au cœur des réflexions sur les territoires vivants, entre sol, eau et société. Les débats ont fait émerger des visions puissantes autour de la ville sur sol poreux, du territoire réversible et de la résilience hydrologique. Ce congrès a affirmé que le paysage n’est pas un décor, mais une pensée du vivant, un outil politique et inspirant pour habiter autrement notre planète. Un des keynotes speakers, Dirk Sijmonds, célèbre architecte paysagiste néerlandais du bureau HNS, dont la démarche vise à redonner de l’espace aux fleuves, a souligné l’importance historique de l’événement : “Le congrès de Nantes établit un nouveau benchmark de référence pour les prochains pays hôtes ; par la qualité des échanges, l’engagement des acteurs et la profondeur intellectuelle des débats, il fixe un cap pour notre planète.” Nous restons profondément marqués par la disparition tragique de notre collègue et ami Kongjian Yu, survenue peu après sa brillante intervention à Nantes. Sa pensée et sa présence dynamique ont touché chacun de nous. Pionnier du concept de “ville éponge”, il défendait une vision du projet urbain où l’eau redevient le fil conducteur du vivant. Pour lui, la ville doit absorber plutôt que repousser, ralentir plutôt qu’accélérer, et célébrer plutôt que nier la présence de l’eau. Dans sa démarche, la maîtrise du paysage rejoint un art de la mesure, de la lenteur et du respect des milieux. De la Chine à l’Europe, son œuvre et sa parole tissent une géographie sensible de la résilience, où l’eau devient à la fois matière, mémoire et horizon du projet. Son intervention à Nantes, d’une justesse et d’une humanité remarquables, restera comme un moment de grâce. Elle est directement accessible sur le site de la FFP, pour ceux qui n’ont pas eu la chance de la vivre à Nantes. Son héritage continue d’irriguer notre pensée et d’inspirer notre engagement collectif.