Alberto Moravia, nom de plume d'Alberto Pincherle, né le à Rome, où il meurt le , est un écrivain et journaliste italien.
Il est aujourd'hui reconnu comme un des principaux romanciers italiens contemporains.
Biographie
Alberto Moravia naît d'un père architecte d'origine vénitienne de confession juive et d'une mère catholique d'origine dalmate dans une famille de quatre enfants.
À l'âge de neuf ans, il est atteint de tuberculose osseuse, ce qui l'immobilise pendant huit années et l'empêche de suivre ses études. Il séjourne dans des sanatoriums durant deux ans. Cela lui laissera de profondes séquelles. Durant cette période, il lit Shakespeare, Molière, Goldoni, Marcel Proust, Arthur Rimbaud, Dostoïevski.
Il écrit à partir de ses 18 ans son premier roman, Les Indifférents, dans le sanatorium de Bressanone, au nord de l'Italie. L'ouvrage est publié à compte d'auteur. Il s'agit d'un roman existentialiste avant la lettre qui restera la référence idéologique et littéraire la plus marquante de l'œuvre de Moravia. Le livre obtient un succès de scandale en raison de l'âpre description désenchantée de la bourgeoisie romaine. À partir de ce succès, l'auteur écrit avec une « régularité bureaucratique » une œuvre abondante.
En 1927, Moravia rencontre Corrado Alvaro et Massimo Bontempelli. Il commence sa carrière de journaliste au magazine 900.
À partir de 1930, il séjourne à Londres, Paris, New York et visite la Chine, la Grèce, l'Allemagne et le Mexique. Il voyage pour échapper, dit-il, à l'atmosphère étouffante du fascisme. En Italie, il signe des articles de presse (journaux et revues). Son net antifascisme le rend suspect et les origines juives de son père contribuent à la précarité de sa situation.
Durant l'écriture de son deuxième roman, d'une durée de six années, il lit Karl Marx et Sigmund Freud.
En 1941, Moravia épouse Elsa Morante, qu'il quittera en 1962. Peu après son divorce, il partage sa vie avec Dacia Maraini. Toutes deux sont des femmes de lettres.
Recherché par les fascistes à partir de 1943, Moravia s'enfuit de Rome et se réfugie dans les montagnes de la ville de Fondi, au nord de Naples, où il séjournera neuf mois.
En mai 1944, Alberto Moravia retourne à Rome et commence à collaborer avec Corrado Alvaro, écrivant pour des journaux italiens de premier plan comme Il Mondo et Il Corriere della Sera, pour lequel il continuera à écrire jusqu'à sa mort.
C'est le succès de La Romana (1947) qui lui apporte une certaine aisance matérielle et la consécration par la critique.
Ces œuvres sont mises à l'Index en 1952.
Avec Alberto Carocci, il lance la revue Nuovi Argomenti en 1953, une des plus importantes revues littéraires de l'après-guerre. Pier Paolo Pasolini les rejoindra plus tard.
Entre 1959 et 1962 Moravia est président du PEN International.
En 1984, Moravia est élu au Parlement européen, représentant le Parti communiste italien. Cette expérience, qui s'achève en 1988, est contée dans Il Diario Europeo (The European Diary).
En 1986, peu après la mort d'Elsa Morante en novembre 1985, il épouse Carmen Llera à qui est dédicacé son recueil de nouvelles La Chose.
Il fut membre du Comité d'honneur du Centre culturel international de Royaumont.
Le 26 septembre 1990, il est retrouvé mort dans la baignoire de son appartement de Lungotevere, à Rome.
Courant littéraire
L'œuvre d'Alberto Moravia dissèque souvent les rapports amoureux, sexuels ou non, charnels ou spirituels, en fouillant de manière distanciée la psychologie de ses personnages.
Jouant avec les conventions sociales et leur influence sur les sentiments, ses livres questionnent volontiers la société et le couple dans leurs rapports (Le Mépris, L'Ennui, L'Amour conjugal, La Femme léopard).
La matière parfois scabreuse de ses romans et de ses nouvelles est moins superficielle que le succès à scandale qu'elle a souvent entraîné : les personnages velléitaires de cette œuvre sont les produits d'une crise de la société bourgeoise, puritaine et fasciste, que Moravia regarde d'un œil impitoyable, mais non dépourvu de complaisance littéraire.
Écrivain mais aussi journaliste et essayiste, il est l'auteur de plusieurs essais sur l'Union soviétique, la Chine, l'Afrique.
Il a été nommé 15 fois pour le Prix Nobel de littérature entre 1949 et 1965.
Plusieurs de ses romans ont été adaptés au cinéma.
Le Mépris est classé 48e dans le classement des Cent livres du siècle réalisé par le journal le Monde.
Œuvres
Romans et recueils de nouvelles
Nouvelles
Essais
Pièces de théâtre
1969 : Le monde est ce qu'il est, mise en scène Pierre Franck, Théâtre des Célestins (Lyon) et Théâtre de l'Œuvre
1971 : Le Dieu Kurt, mise en scène Pierre Franck, Théâtre des Célestins (Lyon) et Théâtre Michel
1988 : L'Ange de l'information, mise en scène Jacques Baillon, Théâtre national de l'Odéon
2008 : L'Amour conjugal, d'après Alberto Moravia, mise en scène Matthieu Roy, Théâtre de Thouars, la Comédie de Reims, Le Gallia Théâtre, Festival d'Avignon et Comédie de Valence
2010 : Plus qu'hier et moins de demain, d'après Georges Courteline, Ingmar Bergman, Alberto Moravia, Woody Allen, mise en scène Pierre Maillet et Matthieu Cruciani, Scène nationale Petit-Quevilly/Mont-Saint-Aignan Petit-Quevilly et Archipel des Glénan Fouesnant
Carnet de voyage
Lettres
Lettres d'amour à Lélo Fiaux, (Dir. Julie Enckell-Juillard), préf. René de Ceccatty, Zoé Éditions, 112 p., 2014 (posthume) (ISBN 978-2881829291)
(it) Se questa è la giovinezza vorrei che passasse presto. Lettere (1926-1940) con un racconto inedito, Bompiani, 2015
Quand tu viendras, je serai presque heureux - Lettres à Elsa Morante, trad. fr. et post. René de Ceccaty, éd. et préf. Alessandra Grandelis, Paris, Bouquins, coll. "Littérature", 256 p., 2023 (posthume) (ISBN 978-2382922699)
Poésie
L'homme nu et autres poèmes, textes inédits, préface et traduction de René de Ceccatty, édition d'Alessandra Grandelis, Paris, Flammarion, 320 p., 2021 (ISBN 978-2080235701)
Adaptations cinématographiques
Son œuvre a donné lieu à des adaptations cinématographiques dont certaines ont marqué l'histoire du cinéma.
1945 : Le Passé qui tue (La freccia nel fianco) d'Alberto Lattuada et Mario Costa
1952 : La Marchande d'amour (La provinciale) par Mario Soldati avec Gina Lollobrigida
1954 : La Belle Romaine(La romana) de Luigi Zampa avec Gina Lollobrigida
1955 : Dommage que tu sois une canaille (Peccato che sia una canaglia) d'Alessandro Blasetti
1955 : Cette folle jeunesse (Racconti romani) de Gianni Franciolini
1960 : La ciociara de Vittorio De Sica avec Sophia Loren et Jean-Paul Belmondo
1960 : Ça s'est passé à Rome (La giornata balorda) de Mauro Bolognini
1960 : Larmes de joie (Risate di gioia) de Mario Monicelli
1960 : Le Bel Âge de Pierre Kast
1962 : Agostino de Mauro Bolognini avec Paolo Colombo, Ingrid Thulin and John Saxon
Jean Duflot, Entretiens avec Alberto Moravia, Paris, Éditions Pierre Belfond, 215 p., 1970
« Essai sur Alberto Moravia », dans Dominique Fernandez, Le roman italien et la crise de la conscience moderne (essai), Paris, Grasset, coll. « La Galerie », , p. 9-138.
Marie-France Renard, « Alberto Moravia, l'homme qui regarde son siècle », in Le Langage et l'Homme, vol. XXVI, no 1 (), p. 77-83
Documentaires
Les Écrivains italiens et l'Italie des écrivains : ombres et questions, documentaire en trois parties, Italiques (deuxième chaîne de l'ORTF, , )
Alberto Moravia, l'homme qui regarde, documentaire de Nico Di Biase, France/Italie, 1997, 45 min
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