Peuples d'Asie Centrale

 

Auteur : Charif Choukourov


Livres

ISBN : 978-2-8414-6027-4
Année : 1995
Editeur : SYROS SIRO
Description : Cet ouvrage témoigne d'une approche originale : des écrits, à l'origine en russe, par deux universitaires tadjiks, sur une proposition conjointe des auteurs et des traducteurs. Il en résulte un texte dense, aux références multiples (mythologiques, littéraires et politiques). Il comprend également un jeu de huit cartes originales sur la région, facilitant la visualisation des nombreuses revendications frontalières comme de la complexité et de la diversité ethniques des Etats concernés. La bibliographie mérite, elle aussi, une mention particulière, par la multiplicité des sources en plusieurs langues qu'elle contient. Au-delà de cet aspect formel, cet ouvrage donne forme à la nébuleuse qu'est encore, pour nombre de personnes, l'« Asie centrale ». Intégrée dans l'empire tsariste, puis bolchevique, son émergence en tant que région politique est lente et fragile. Le moindre des mérites des auteurs est d'apporter des éclaircissements sur ce difficile contexte, même s'ils ne cachent pas qu'il est « strié de signes encore malaisément déchiffrables ». Les auteurs dressent un tableau clair, le plus précis possible de l'histoire ancienne comme de la conquête russe de cette partie du monde. Ce retour dans le temps permet de souligner l'importance des mythologies nationales, face aux données objectives, dans la représentation de l'autre. L'héritage russe et soviétique est jugé avec sévérité : catastrophes écologiques et économiques, étouffement des traditions nationales, désarroi des communautés russophones restées sur place. Enfin, la création d'un nouvel espace musulman est analysée avec lucidité. Les auteurs procèdent à une étude, rare en français, des relations entre l'islam officiel et l'islam clandestin, ainsi que de la coexistence complexe entre les visées nationalo-com- munistes et celles des partis islamiques. Enfin, Charif et Roustam Choukourov consacrent de longs développements à chacun des cinq Etats de la région. Le Kazakhstan, le plus pragmatique, dont le Président réussit à concilier un nationalisme modéré avec un soutien sans faille à la Russie en matière de politique extérieure ; le Kirghizistan, qui a le plus à craindre d'une paupérisation galopante ; le Turkménistan, le plus riche, qui réussit le mieux son entrée sur la scène internationale ; l'Ouzbékistan, le plus soviétique de tous ; le Tadjikistan, enfin, dont le régime dépend le plus de l'interventionnisme russe, paradoxe pour l'Etat le plus éloigné des frontières russes. Les auteurs insistent sur la dynamique de l'ancien Turkestan, qui représente pour eux « un processus ethno-culturel allant de V Europe au Xinjiang », « un vecteur qui sous-tend depuis deux millénaires toute l'histoire de l'Asie centrale. » Ce sujet mériterait peut-être d'autres développements pour en mieux connaître la complexité. Isabelle CORDONNIER